Au Canada des milliers de livres jugés discriminatoires sont brûlés
Des milliers de livres présents dans des écoles canadiennes, jugés discriminatoires à l’égard des Premières nations, autrement dit les Indiens, ont été détruits depuis 2019. Parmi eux, de grands classiques de la littérature jeunesse.
Dans Tintin en Amérique, Hergé y évoque les “Peaux-Rouges”, une appellation jugée dégradante ainsi que dans Le Temple du Soleil. Idem pour les trois albums de Lucky Luke, où les Indiens incarnent soit des méchants, soit des paresseux, soit des alcooliques, quand que ce n’est pas tout à la fois. Une caricature des Indiens jugée dégradante et irrespectueuse.
Le Conseil scolaire de Providence
Cette grande purge littéraire est à l’initiative, du conseil scolaire de Providence, dans le Sud-Ouest de l’Ontario, qui représente 30 établissements du primaire et du secondaire. C’était une démarche éducative, se justifie le conseil scolaire catholique, qui indique qu’“enterrer les cendres du racisme et de la discrimination“, c’est “faire du positif à partir du négatif”. Dans Astérix et les Indiens, les femmes sont jugées trop aguicheuses et Pocahontas de Disney, considérée comme une représentation historique erronée.
Le Canada a un problème avec ses peuples autochtones et le sujet fait débat en pleine période électorale. Cependant, il y a aujourd’hui consensus général sur la nécessité de repenser l’enseignement de l’histoire du pays et mieux protéger les descendants des peuples, et le pays s’est lancé dans une grande réconciliation avec ses Premières nations.
Faut-il détruire les symboles du passé ou les garder en les remettant dans leur contexte ?
C’est le même débat que nous avons autour des déboulonnages de statues de généraux esclavagistes aux Etats-Unis ou ailleurs. Faut-il détruire les symboles du passé ou les garder en les remettant dans leur contexte ? Faut-il brûler les livres ou en faire une matière pédagogique pour faire comprendre les évolutions de la société ?
Un livre français, Les Indiens, publié en 2000, a été écarté parce qu’il avait été conçu “sans consultation des communautés autochtones du Canada. “Jamais à propos de nous sans nous” précise Suzy Kies chercheuse et coprésidente de la Commission autochtone du Parti libéral du Canada. Toutes les histoires sont écrites par les Européens, avec une perspective euro-centriste.
C’est faire “comme les nazis dans les années 1930” ou “comme les talibans”
“Il y a eu des millions de livres écrits dans l’histoire” a notamment dit Yves-François Blanchet, chef du Bloc québécois. “La quasi-totalité d’entre eux véhicule sûrement des idées qu’aujourd’hui on ne cautionne plus. On ne va pas tous les brûler.”
Car brûler des livres, c’est faire “comme les nazis dans les années 1930” ou “comme les talibans” ajoutent certains Canadiens outrés qui convoquent régulièrement sur les réseaux sociaux cette citation de l’écrivain Heinrich Heine : “Là où l’on brûle des livres, on finit aussi par brûler des hommes.” Dans un courriel à Radio Canada, le Conseil scolaire Providence assure “regretter sincèrement l’impact négatif qu’a pu avoir cette initiative qui se voulait comme un geste de réconciliation“.
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