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Portrait de Sarah Bernhardt, par Georges Jules Victor Clairin, 1876, huile sur toile. Petit Palais, musée des Beaux-arts de la Ville
de Paris France © Paris Musées/Petit Palais 

Sarah Bernhardt, la divine exposition à voir au Petit Palais

Le Petit Palais à Paris met à l’honneur du 14 avril au 27 aout la Divine Sarah Bernhardt, figure emblématique du XIXe et XXe siècles, à l’occasion du centenaire de sa mort, à travers 400 œuvres dans la rétrospective « Sarah Bernhardt. Et la femme créa la star ».

Considérée comme l’une des plus grandes actrices de tous les temps, “La Divine Sarah”, actrice tout autant qu’artiste, fait l’objet d’une exposition exceptionnelle au Petit Palais à Paris. Malgré son succès professionnel, la vie personnelle de Sarah Bernhardt aura été marquée par la tragédie. Atteinte d’une tuberculose osseuse avec gangrène, elle sera amputée d’une jambe, mais continuera de monter sur les planches, et bien que le gouvernement français lui refuse des obsèques nationales, contrairement à Victor Hugo, c’est une foule immense qui se précipite le jour de ses obsèques pour rendre un dernier hommage au « Monstre sacré » comme l’avait surnommée son ami Jean Cocteau. Le Petit Palais, qui lui consacre cette exposition, détient l’un de ses plus beaux portraits peint par son ami Georges Clairin et offert au musée par son fils Maurice à la mort de sa mère, ainsi que plusieurs sculptures qu’elle a elle-même réalisées.

Le Monstre Sacré à la voix d’or

Sarah Bernhardt par Nadar, en 1864 drapée de blanc,
vers 1859, épreuve sur papier albuminé, BnF, département des
Estampes et de la photographie, Paris, France © BnF/ Wikimedia Commons

Née en 1844 à Paris, enfant illégitime d’une courtisane et d’un inconnu, la jeune Sarah élevée par sa mère dans un pensionnat, va développer un intérêt pour le théâtre, et à l’âge de 16 ans, être acceptée à l’École de théâtre de la Comédie-Française, où elle a fait ses débuts sur scène en 1862. Vaste et longue comme un foyer de théâtre, une galerie offre la profondeur idéale à l’exposition des rôles qui ont marqué la carrière de Sarah Bernhardt. Jeu, mouvement et costumes y sont mis à l’honneur. Au fil des ans, devenue une star internationale, elle tourne dans des films muets à Hollywood et effectue des tournées dans le monde entier, y compris aux États-Unis, en Australie et en Amérique du Sud. Chaque séquence de cette rétrospective est un univers à l’architecture particulière, soutenu par les couleurs, la lumière, les images, imprégné de sa présence. L’iconique portrait par Clairin veille sur l’ensemble et rassemble autour de lui les portraits qu’ont fait d’elle ses amis. Figure emblématique de la vie culturelle parisienne, son style de vie excentrique et sa beauté ont aussi attiré ses contemporains et ses amis comptent parmi les artistes et les écrivains célèbres tels que Victor Hugo, Gustave Flaubert et Oscar Wilde. Fumeuse invétérée, Victor Hugo la surnomme même, « La Voix d’Or » pour souligner le magnétisme de cette voix si distinctive. Outre les pièces classiques, elle osera les rôles masculins, interprétant Hamlet et Lorenzaccio, une transgression pour les femmes artistes à l’époque. On la retrouve ainsi dans des rôles tragiques tels que La Dame aux camélias et Phèdre, et surtout dans les débuts du cinéma où elle apparaît dans La Tosca (1909) et Sarah Bernhardt à Belle-Île (1912). Les visiteurs sont donc invités à découvrir la carrière et les tournées de Sarah Bernhardt à bord d’un train. Pionnière dans le domaine de la production théâtrale, elle ira jusqu’à payer sa propre compagnie en 1899, et superviser la mise en scène de ses propres pièces avec un contrôle total sur la conception des costumes et des décors. Au centre de l’exposition, sur un tapis d’Orient, le désordre des sculptures sur gaines ou sur sellettes, des peintures sur chevalets au milieu des plantes vertes, révèle un aspect méconnu de l’actrice en artiste peintre et sculptrice. Collectionneuse d’art passionnée on découvre qu’elle possédait une grande collection d’objets d’art asiatiques. À la luminosité de l’atelier répond l’obscurité de la chambre où se mêlent l’intimité de ses objets personnels et l’exotisme de ses collections.

La citoyenne engagée

L’atelier de Sarah Bernhardt, 1879, par Marie-Désiré Bourgoin. Aquarelle et gouache, New York, The Metropolitan Museum of Art © The Metropolitan Museum of Art, Dist. RMN-Grand Palais/ image of the MMA

Au fil du parcours on aperçoit un ample espace sous verrière, baigné de lumière qui recrée l’atelier salon de Sarah Bernhardt avec ses boiseries aux teintes chaudes, la vaste arcade au-delà de laquelle se devinent des arrière-plans obscurs. Toute sa vie, l’artiste fut aussi une citoyenne engagée dans les combats de son temps, et l’une des premières actrices à utiliser sa notoriété pour soutenir des causes sociales et politiques. En 1870 durant la guerre franco-prussienne, La Divine organise contre toute attente, une ambulance au Théâtre de l’Odéon, et au moment de l’affaire Dreyfus, se range aux côtés d’Emile Zola lorsqu’il fait paraître J’accuse. Durant le Première Guerre mondiale, amputée de la jambe droite depuis 1915, elle n’hésite pas à rejoindre le Théâtre aux Armées, avec d’autres vedettes théâtrales de l’époque qui se produisent sur le Front pour soutenir le moral des soldats, appelés aussi « poilus ». L’année suivante en 1916, elle s’embarque malgré sa jambe en ivoire, pour dix-huit mois de tournées aux Etats-Unis où elle cherche à sensibiliser l’opinion publique au sort de l’Europe. Au théâtre, elle joue des pièces patriotiques comme Les Cathédrales d’Eugène Morand ou sa propre pièce Du théâtre au champ d’honneur, et au cinéma, ses films reflètent aussi son engagement, comme dans Jeanne Doré (de Louis Mercanton d’après la pièce de Tristan Bernardt, 1915) où elle joue le rôle de la mère d’un condamné à mort ou encore dans Mères françaises (Louis Mercanton, 1917) qui a pour toile de fond la Grande Guerre. Le foisonnement de portraits mais aussi les affiches, de publicités, de caricatures, de photos dédicacées rend compte de l’écho médiatique de la Divine. L’exposition se conclut à Belle-Île, « havre, paradis, refuge » entre algues et amitiés. Sarah Bernhardt décède en 1923, à l’âge de 78 ans.

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