Acteur chéri de l’Amérique et grand défenseur du cinéma indépendant, Robert Redford est décédé le 16 septembre à l'âge de 89 ans. © Instagram

Robert Redford, l’homme qui murmurait à l’oreille de l’Amérique

Lise-Marie Ranner-Luxin
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Rédactrice en chef et fondatrice de Rapporteuses, Lise-Marie Ranner-Luxin allie vision éditoriale et plume affûtée. Passionnée par les histoires humaines, les tendances culturelles et l’actualité qui...
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C’est une gueule, une silhouette, une idée du cinéma qui s’éteint. Robert Redford est mort mardi 16 septembre, à 89 ans, dans sa maison de l’Utah. Hollywood perd plus qu’un acteur : un visage solaire devenu, en un demi-siècle, un totem.

De Butch Cassidy à Jeremiah Johnson, des Hommes du président à Out of Africa, Redford a incarné une Amérique à la fois romantique et tourmentée. Ses rôles sentaient la poussière des plaines, la sueur des salles de rédaction, la nostalgie des amours impossibles. Avec Sydney Pollack, complice de toujours, il tourna sept fois, jusqu’au mythique Out of Africa aux côtés de Meryl Streep. Plus tard, il surprit son monde en endossant l’uniforme gris et glaçant d’Alexander Pierce dans les Marvel, comme pour rappeler qu’un acteur, même icône, n’est jamais prisonnier de son image.

Mais Redford ne se contentait pas d’aligner les classiques. Derrière la caméra, il signa Des gens comme les autres, Oscar de la meilleure réalisation en 1981, ou encore Et au milieu coule une rivière (avec un Brad Pitt encore inconnu), fresque liquide et lumineuse qui reste dans les mémoires. À la fin de sa carrière, en 2013, il signait encore Sous surveillance, comme un dernier clin d’œil à ses obsessions : le pouvoir, le mensonge, les zones d’ombre de la démocratie.

Lui qui avait incarné Bob Woodward dans Les Hommes du président, plongeant dans les coulisses du Watergate, n’avait cessé d’alerter sur les menaces qui pèsent sur le journalisme et la vérité. À l’heure où Donald Trump attaque le New York Times à coups de procès-bâillons, (le président américain a annoncé lundi soir poursuivre le prestigieux quotidien pour diffamation, réclamant 15 milliards de dollars, 12,7 milliards d’euros), difficile de ne pas voir en Redford le fantôme d’un temps où l’investigation pouvait encore faire tomber un président.

Politique, il l’était aussi par ses combats. Précurseur, Redford avait mis sa notoriété au service de l’écologie avant même que le mot ne devienne un slogan de campagne. Depuis les années 70, il alertait sur le climat, s’opposait aux projets industriels, mettait son carnet d’adresses et son portefeuille au service du Natural Resources Defense Council.

Et puis il y a Sundance. Sans lui, le cinéma indépendant américain serait sans doute resté confiné aux marges. Il avait fait de ce festival de l’Utah, lancé en 1978, la rampe de lancement d’une génération entière de cinéastes. C’est là qu’il donna leur chance à des outsiders, dont une jeune Martiniquaise : Euzhan Palcy, première réalisatrice noire produite par un grand studio américain, à qui Redford avait ouvert la porte quand Hollywood la maintenait fermée.

Star, cinéaste, activiste : Robert Redford fut tout cela à la fois. Barack Obama ne s’y était pas trompé en le décorant de la médaille présidentielle de la Liberté, saluant en lui un homme « qui a changé le visage du cinéma américain et défendu la planète ».

Le Kid est parti. Reste la légende.

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Rédactrice en chef et fondatrice de Rapporteuses, Lise-Marie Ranner-Luxin allie vision éditoriale et plume affûtée. Passionnée par les histoires humaines, les tendances culturelles et l’actualité qui fait débat, elle supervise la ligne éditoriale et guide l’équipe avec exigence et créativité. Journaliste expérimentée, elle sait capter les détails qui font vivre un récit et mettre en lumière des voix parfois oubliées, tout en cultivant un regard critique et engagé sur le monde qui l’entoure.
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