À la tête de Maison Gala, Carmen Carrozzo revendique un luxe lent, ancré dans le geste et la matière. © Sixtine/D'ELMARCQ PHOTOGRAPHY

Maison Gala : la lente révolution du luxe

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Rédaction Rapporteuses
Observatrices curieuses et infatigables, Rapporteuses racontent le monde qui les entoure avec un regard à la fois précis et espiègle. Du glamour des soirées parisiennes aux...
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Carmen Carrozzo a bâti Maison Gala comme une maison indépendante, entre la France et l’Italie, où chaque céramique raconte une vision du monde : celle d’un luxe conscient, sincère et pérenne. À rebours du rythme des marchés, elle fait de la lenteur un modèle économique et culturel.

Rapporteuses : Vous revendiquez un ancrage artisanal fort, comment avez-vous transformé cette exigence de savoir-faire en levier de croissance ?

Carmen Carrozzo : L’artisanat est pour moi une posture avant d’être un mode de production. Il impose le temps, la précision et le respect de la matière. C’est en valorisant cette exigence, loin des logiques industrielles, que Maison Gala s’est construite une identité forte. Chaque collection devient une vitrine de savoir-faire, un manifeste de la lenteur et de la justesse, qui attire naturellement une clientèle en quête de sens et de singularité.

Rapporteuses : À l’heure où le e-commerce domine, quel est le rôle de l’expérience physique, l’émotion palpable dans votre modèle ?

C.C. : Le digital est un outil, pas un substitut à l’émotion. L’expérience physique reste essentielle : toucher une céramique, voir la lumière glisser sur un émail, sentir la matière, c’est ce qui crée le lien. C’est pour cela que nous collaborons avec des restaurants, des hôtels, des événements et des lieux de vie où nos pièces dialoguent avec des espaces réels. L’objet prend tout son sens quand il s’ancre dans une expérience vécue.

Notre force, c’est de refuser la standardisation. Là où les grandes enseignes vendent des objets, nous proposons une expérience culturelle.

Carmen Carrozzo

Rapporteuses : Vous collaborez avec des céramistes, brodeurs et tisserands, comment choisissez-vous vos partenaires, et comment construisez-vous une relation durable ?

C.C. : Je choisis mes partenaires comme on choisit une conversation : sur une sensibilité commune. J’aime comprendre leur geste, leurs contraintes, leur univers. Nous travaillons dans la durée, avec la transparence d’une relation humaine, pas purement contractuelle. La durabilité passe par le respect mutuel, du temps, du travail, de la valeur de l’autre.

Rapporteuses : Votre “espace pro” propose des offres sur mesure, est-ce la porte stratégique pour faire entrer Maison Gala dans les palaces, hôtels, restaurants ?

C.C. : Exactement. L’espace pro est une réponse naturelle aux besoins des lieux d’exception qui souhaitent créer une identité de table unique. Nous concevons des pièces exclusives pour chefs étoilés (Nicolas Beamann et son restaurant Maison Rostang double étoiles Michelin par exemple, ou groups de restauration comme Le Clan des Mamma de la Bonbonnières avec leur 15 restaurants dans toute la France ou la décoration pour les restaurants du groupe Big Mamma, ou encore les vitrines de Boucheron avec nos oursins en céramiques ou anémones) , en cohérence avec leur univers esthétique. C’est une extension naturelle de notre philosophie : créer des objets qui racontent une histoire et signent une expérience.

Nous avons choisi la voie du raisonnable : des circuits courts, des productions limitées, une transparence totale avec nos partenaires. Ce modèle n’est pas le plus rapide, mais il est plus sain.

Carmen Carrozzo

Rapporteuses : Dans le luxe “table & décoration”, où se situe votre marge de manœuvre pour l’innovation sans trahir l’authenticité ?

C.C. : L’innovation, chez Maison Gala, est discrète. Elle se glisse dans les détails : une texture, une glaçure, un assemblage inattendu. Nous ne cherchons pas à réinventer la table, mais à la réenchanter. L’audace se cache dans la sobriété et la recherche d’un équilibre entre tradition et modernité.

Rapporteuses : Quelles sont vos batailles face aux marchés de masse (Ikea, grandes chaînes) comment vous différenciez-vous sur le plan marketing et positionnement ?

C.C. : Notre force, c’est de refuser la standardisation. Là où les grandes enseignes vendent des objets, nous proposons une expérience culturelle. Chaque pièce Maison Gala porte une émotion, une trace humaine. Le marketing ne consiste pas à “vendre plus”, mais à “faire mieux sentir”. C’est une bataille de valeurs, pas de volumes. Nous protégeons le petite artisanat authentique et franco-italien .

Rapporteuses : Dans un contexte de contraintes logistiques, coûts matières en hausse et scepticisme sur les chaînes longues, comment répondez-vous à la pression financière ?

C.C. : Nous avons choisi la voie du raisonnable : des circuits courts, des productions limitées, une transparence totale avec nos partenaires. Ce modèle n’est pas le plus rapide, mais il est plus sain. Le respect des temps nécessaires à l’artisanat . Nous préférons maîtriser la croissance plutôt que la subir. Maison Gala reste une maison indépendante, libre de ses équilibres.

Rapporteuses : Quelle est votre stratégie digitale, storytelling, réseaux sociaux, contenus, pour que Maison Gala soit perçue comme une maison de “luxe accessible” plutôt qu’un simple e-shop ?

C.C. : Notre communication s’appuie sur l’émotion visuelle et la sincérité du ton. Nous racontons les gestes, les lieux, les personnes derrière chaque objet. Le storytelling n’est pas une mise en scène : c’est une manière de partager une culture du beau, du simple et du durable. Les réseaux sociaux deviennent alors un lieu de dialogue, pas de publicité.

Rapporteuses : Regard vers demain : quels marchés étrangers visez-vous, et comment adaptez-vous votre proposition à des sensibilités culturelles différentes ?

C.C. : Nous recevons beaucoup d’intérêt de la part de differents marchés internationals mais notre cible est surtout le client en Europe. Ce marché est sensible à l’authenticité et à la valeur du geste. L’adaptation ne passe pas par la concession, mais par l’écoute : comprendre les rituels de table, les palettes chromatiques, les usages. Le style Maison Gala reste reconnaissable, mais il sait s’accorder aux nuances culturelles surtout européennes.

Rapporteuses : Si vous deviez vous battre demain, quel “pari fou” prendriez-vous, un nouveau segment produit, une expérience de marque radicale, ou un repositionnement audacieux ?

C.C. : J’aimerais créer une “Maison Gala Table Expérience”, un lieu où la table devient un langage à part entière : art, design, musique, parfum, lumière. Une scénographie vivante de ce que peut être le luxe convivial. Le pari, c’est de transformer un art de vivre en expérience sensorielle et culturelle totale.

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Observatrices curieuses et infatigables, Rapporteuses racontent le monde qui les entoure avec un regard à la fois précis et espiègle. Du glamour des soirées parisiennes aux coulisses des affaires, de la culture aux nouvelles tendances, elles parcourent la ville et le monde pour capter les histoires, les personnages et les mouvements qui font l’actualité. Toujours sur le terrain, elles mêlent rigueur journalistique et sens du récit, pour offrir aux lecteurs des portraits, enquêtes et chroniques à la fois informatifs et captivants.
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