« Qui a trahi Anne Frank » de Rosemary Sullivan © HarperCollins

Holocauste : qui a dénoncé Anne Frank et sa famille aux Nazis en 1944 ?

Qui a trahi Anne Frank ? est le livre choc de Rosemary Sullivan qui sort le 19 janvier et le résultat d’une enquête de cinq ans, menée par une équipe d’historiens, de criminologues, d’enquêteurs, qui ont utilisé les moyens les plus modernes pour identifier enfin le « Traître ».

Qui ne connaît pas ou n’a pas lu  Le journal d’Anne Frank, ce Best-Seller mondial tiré du journal intime d’Anne Frank adolescente juive allemande cachée avec sa famille à Amsterdam pendant l’occupation des Pays-Bas par l’Allemagne nazie. Près de 80 ans après sa mort, un mystère demeure sur la ou les personnes qui l’auraient dénoncée pour la livrer aux Nazis. Un livre lève peut-être enfin le voile sur cette abjecte dénonciation. Une boîte de Pandore au caractère explosif qui suscite déjà de nombreuses controverses.

Identifier « le Traître »

Anne Frank à 11 ans © Encyclopédie multimédia de la Shoah

Le 263 Prinsengracht, est l’adresse tristement célèbre en plein centre d’Amsterdam, de l’entrepôt où se cachaient Anne Frank, sa sœur, ses parents, un couple de leurs amis et leur fils, ainsi qu’un ami dentiste. Ils y ont vécu du 6 juillet 1942 au 4 août 1944, avant d’être arrêtés et déportés le 3 septembre 1944.

Plusieurs enquêtes officielles et plusieurs livres ont essayé de déterminer celui qui avait dénoncé les Frank et leurs amis, mais sans résultats. Des conclusions battues en brèche par cette nouvelle enquête confiée à Vincent Pankoke. Cet ancien du FBI installé en Floride, habitué à traquer des barons de la drogue, a parcouru l’Europe en quête de révélation sur l’identité du « Traître ». Et c’est un travail d’investigation d’une ampleur colossale qui a été mise en œuvre, faisant appel à des historiens, des enquêteurs, des criminologues, des graphologues, des spécialistes du profilage sous la direction de cet ancien agent spécial du FBI, recruté pour son savoir-faire. Au bout de cinq ans de recherche, « L’Equipe » comme elle s’est nommée, après avoir éliminé plusieurs suspects, remonte à un un homme, un sympathisant nazi, ancien employé d’Otto Frank, le père d’Anne Frank. Ce dernier aurait fait chanter Otto Frank, menaçant même de le dénoncer pour une broutille remontant à 1941.

La fameuse lettre anonyme

Anne Frank avec sa mère et sa soeur

Anne Frank avec sa mère et sa soeur à Francfort en 1933 © Encyclopédie multimédia de la Shoah

Otto Frank qui sera le seul rescapé, et qui va consacrer le restant de sa vie au journal de sa fille, reçoit une lettre anonyme à son retour de déportation. Cette lettre indique que sa cachette a été signalée par un notaire, qui aurait fourni à l’occupant nazi une liste entière d’adresses où des Juifs se cachaient. Et ce notaire c’est un Juif, Arnold van den Bergh. Mais pourquoi aurait-t-il dénoncé les Frank et leurs amis ? Selon les éléments de l’enquête, l’expertise qui a permis d’authentifier la lettre est formelle : elle a bien été tapée sur la machine à écrire d’Otto Frank. Mais qui est donc ce notaire juif qui aurait fourni aux nazis des adresses d’autres Juifs ? C’est un membre éminent de la communauté juive qui réside dans une élégante villa, passionné par les tableaux de maîtres des XVIIe et XVIIe siècles. C’est même lui qui facilitera plusieurs transactions qui conduisent des dignitaires nazis, comme Hermann Göring, à acquérir à bas prix de nombreuses œuvres d’art dont certains appartenant à des Juifs.

« Qui a trahi Anne Frank » de Rosemary Sullivan © HarperCollins

Des révélations qui sèment déjà le doute 

Rosemary Sullivan est consciente du caractère explosif de cette révélation, qu’elle va déclencher avec Qui a trahi Anne Frank ? Cependant elle essaie 80 ans après, de trouver des circonstances atténuantes au « Traître ». Selon elle Arnold van den Bergh, aurait été obligé, soumis à un dilemme abject pour sauver sa famille : « Il n’est pas l’ultime responsable de la mort des résidents du 263 Sprinsengracht. Cette responsabilité sera toujours celle des occupants nazis, qui ont terrorisé et décimé une société, forçant les gens à dénoncer leur voisin » déclare l’auteure.

Selon le France Inter, elle évoque « les sentiments partagés » des membres de L’Equipe à l’idée de rendre publiques leurs conclusions. « Ils savaient combien leurs découvertes étaient importantes – et douloureuses. Ils s’attendent aujourd’hui à des réactions tout aussi violentes. » Ronald Leopold, directeur exécutif de la Maison d’Anne Frank, qui a été le premier à réagir, reste lui prudent et estime que des questions subsisteraient encore sur la lettre anonyme et qu’une enquête plus approfondie était nécessaire.

« Vous devez être très prudent avant d’inscrire quelqu’un dans l’histoire comme celui qui a trahi Anne Frank si vous n’êtes pas sûr à 100 ou 200% de cela », a-t-il souligné auprès de l’AFP. D’autres experts se sont montrés plus critiques. « Un non-sens diffamatoire », a même réagi avec virulence Bart van der Boom, professeur à l’université de Leiden, auprès de la télévision publique NOS.

« Qui a trahi Anne Frank ? », de Rosemary Sullivan, traduit de l’anglais par Carole Delporte et Samuel Todd, est publié par les éditions HarperCollins.

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